![]() Après avoir publié les deux premiers textes sur la punition, certains commentaires amènent à penser que la punition reste mal comprise. Surtout que je l'ai surtout traitée comme faisant partie intégrante du BDSM. Un postulat peut être faux. Peut-on imaginer un BDSM SANS punition ? Aussi bizarre que cette question apparaisse (genre sujet du BAC de 1968 qui mène les jeunes sur les barricades) j'ai envie de dire un grand "oui mais…". Moi-même je l'utilise peu et de manière douce. Il ne faut pas se tromper : si on considère une punition comme une sanction, faire la leçon avec une grande bouche comme la mienne qui assène, des minutes durant, des arguments de vieux con qui sait tout, c'est aussi violent qu'une punition physique. Alors, supprimons la punition. Allez hop. Déjà que la fessée pour les enfants est mal vue et que les mettre au coin c'est de la maltraitance, pourquoi faire perdurer cette habitude patriarcale ? On a bien éradiqué le droit de cuissage (qui n'a jamais existé) et enlevé la promotion canapé pour la changer en chantage sexuel. Bref, pendant qu'on y est, supprimons la punition dans le BDSM.
Parce que la question elle est vite répondue et je vais vous épargner tout le reste du texte : il n'y a pas obligation d'utiliser la punition dans la relation BDSM. Absolument pas. Point. Au même titre que certains ne pratiquent pas l'ABDL, la scatophilie, les aiguilles ou le branding. De la même façon que d'autres ne s'exhibent pas ou n'ont pas de relation sexuelle. Aussi bizarre que cela puisse paraître certaines soumises ne sont absolument pas masochistes et ne supportent pas l'impact mais adorent le protocole et servir. On le dit, on le répète, il n'y a pas de dogme, pas d'école du BDSM et dans cette série de textes sur les Mots Écartelés je m'acharne à démontrer qu'on utilise des termes dont l'histoire est souvent détournée voire étymologiquement infondée. Donc, la punition n'est PAS une obligation ni un incontournable. Circulez. Et là, au fond du lit portant un débardeur et une petite culotte en coton écru en lisant son téléphone, ou sur sa petite chaise de bureau pendant sa pause sur l'ordinateur du bureau, je vois une soumise béotienne dont le cœur bat la chamade. Rêvant qu'un apollon en costume sombre lui fasse signe de se mettre sur ses genoux et lui dise "tu n'as pas été sage, je vais être obligé de te donner une fessée". Et là, elle lit "la punition n'est pas une obligation". Mais, mais…Tout part à vau-l'eau… Alors j'utilise une belle expression comme "partir à vau-l'eau" parce ce que si j'écris "tout part en couille", je risque d'être détecté par les IA de google qui vont censurer ce texte. Mais l'idée est quand même là : tout part en vau-couille, vous l'avez compris. Le pire c'est qu'écrire "partir en vau-couille" est correct puisque que vau est de la même origine qu'aval : vers la vallée, contraire d'amont, vers la montagne. Donc partir en vau-couille, partir dans le sens des couilles, est vraiment doublement correct (pour aval). (J'espère que google s'est étranglé avec mes couilles.) Bref, après cette digression étymologique, je reviens à cette impétrante soumise qui rêve d'être fessée sur les genoux du dominant parfait et qui apprend par l'entremise de ce texte que, bah non, la punition n'est pas une obligation. Restez mouillée mademoiselle. Continuez de serrer les cuisses en vous cambrant pour accentuer la pression périnéenne qui vous offre les prémices de plaisirs profonds. Car, oui, la punition LUDIQUE reste un incontournable. Toutes les façons possibles de vous faire ployer, vous sentir utilisée et humiliée et surtout de sentir la force et la chaleur d'une main ferme ou d'une cravache cinglante, sont possibles sous l'égide de phrases comme : "tu as désobéi, tu vas être punie", ou "tu es une souillon, punition " et même "tu es une chienne, tu vas sentir ta peine". Oui ça rime. Tant que c'est du jeu, on peut. Donc, parlons de la punition. La vraie, la violente. La punition dite éducative face à sa version ludique. Est-ce que la punition, outil séculaire d'asservissement des masses, est indispensable dans le BDSM, instrument de libération personnelle ? Il y a dans la continuité ou l'arrêt de cette pratique une mutation anthropologique qui questionne notre rapport à l'autorité et à la conscience de soi. Fausse punition et vraie endorphine Contrairement aux punitions étatiques qui visent à briser l'individu, la punition BDSM active des mécanismes neurochimiques spécifiques à l'instar des sessions d'impact. Lorsque la douleur est anticipée et intégrée dans un cadre érotique, le cerveau déclenche une cascade d'endorphines qui transforme la souffrance en extase. Cette alchimie explique pourquoi certaines soumises développent une addiction à la punition. L'idée de la faute commise et de l'humiliation vient s'ajouter à la punition physique et renforce un effet érotico-chimique. Il est évident que le trio punition/humiliation/plaisir est alors mal utilisé car il ne peut qu'encourager la récidive. Il faut catégoriser cette fausse punition comme un jeu érotique sans objectif disciplinaire puisqu'il a un effet contraire. Reste qu'on oublie que ce n'est pas tant la punition qui discipline mais le soulagement procuré par le pardon. On tourne la page, il y a libération physique et morale. Alors comme disait un de mes interlocuteurs : puisque c'est le pardon qui est important, pourquoi ne pas pardonner sans avoir à punir avant ? Il y a quand même un système d'apprentissage qui se met en place quelquefois par la force. Tout ne s'apprend pas de manière explicative. Parce qu'il y a des blocages, de mauvaises habitudes qui se sont formées lorsqu'on grandit ou de par nos expériences de vie, quelquefois il faut tapoter pour que le bouchon sorte. La punition, aussi coercitive qu'elle paraisse permet quelquefois d'avancer par à-coups. Je le concède peut-être pas systématiquement. Le dialogue et l'explication sont les mamelles de la discipline et de l'éducation. Dans une relation BDSM équilibrée, la punition consensuelle est l’inverse de la punition autoritaire. Si la soumise admet une faute, elle peut aussi avoir envie d'une punition pour se faire pardonner. Elle peut décider que c'est ce moyen qui transforme la faute. Certainement par réflexe d'une culture judéo-chrétienne certes. Si on veut se démarquer de la société, on établit que si la soumise a compris sa faute, le pardon se suffit à lui-même. Sur le principe c'est juste. Un petit bémol cependant : le principe d'échange de pouvoir pourrait sembler être mis à mal car trop mou. La magnanimité ne doit pas passer pour une faiblesse. Et c'est dans l'équilibre entre le dominant et la soumise que l'on trouve la bonne alchimie. Certaines soumises désirent être plus tenues alors que d'autres aspirent à être encouragées. Et là encore c'est au dominant de décider de la méthode qui convient. Nous avons un pouvoir, et j'ai envie de dire un devoir, de transformation. En tant que pratiquants BDSM, nous nous réapproprions les codes de la violence sociale pour notre bien-être. Nous en devenons donc subversifs car comment contrôler quelqu'un qui utilise la punition comme outil de plaisir ? En s'appropriant les codes de la violence dans un cadre consensuel, nous nous affranchissons de la peur que ces mêmes codes imposent socialement sous principes d'égalité. Nos pratiques vident la punition étatique de sa substance terrifiante en la transformant en jeu érotique. Si nous l'abandonnons, nous la laissons à l'État. Dans ce cas, il nous faut quand même une justification, un message virtuel à adresser à cet État : nous abandonnons la punition justement parce qu'elle est étatique et sans effet. Le principe de liberté ultime serait-il de faire le contraire en tout point de la société ? N'est-ce pas ce que nous faisons déjà sur de nombreux points ? Quand la punition redevient oppression De façon plus réaliste, on doit aussi voir la punition comme une porte d'entrée à certains prédateurs qui reproduisent les schémas toxiques sous couvert de BDSM. La manipulation des béotiennes et l'amalgame entre punition et discipline douloureuse causent quotidiennement des traumatismes. Si nous éradiquions la punition du BDSM, nous offririons aux débutantes un levier supplémentaire pour juger un dominant et faire le tri. Sauf que c'est un mirage. Les prédateurs continueront d'utiliser la culpabilité sans le mot "punition". Pire, on enlève au dominant une possibilité de variation en accord avec sa soumise. Sur le principe la punition met beaucoup de pression morale. Le dominant n'a de comptes à rendre qu'à sa conscience et à sa soumise. Cette responsabilité exige une maturité considérable : être psychologue, médecin, amant et protecteur. On est le Juge Dredd de la BD : policier, juge et bourreau. Un peu trop de pouvoir pour une seule personne. Il y a une partie secrète de la punition que peu reconnaissent. Déjà concernant la domination, en assumant nos pulsions dans un cadre contrôlé, nous cessons de les projeter destructivement sur autrui. Le dominant qui fouette sa soumise consentante ne ressentira pas le besoin d'humilier ses collègues. Nos pratiques canalisent et subliment nos instincts au lieu de les refouler. La punition répond-t-elle à une part sombre de la domination ? Est-elle seulement négative ou détient-elle une partie lumineuse qui peut nous soulager ? C'est ce que vend la religion : on se punit pour devenir meilleur. Si on utilise la punition en cercle restreint, peut-on se pardonner ? La punition serait-elle la pratique ultime du pardon et de l'évolution morale ? Remettons l'église au milieu du village : la punition BDSM doit obéir à des règles strictes (proportionnalité, justification, réhabilitation). Entre deux protagonistes qui se font confiance, une forme de justice peut être rendue sans corruption. La punition retrouve sa fonction première : corriger sans détruire. Le pouvoir est sans doute salvateur quand il est bien utilisé. De la bonne et de la mauvaise punition Enfin, on a le droit de s'attaquer au mythe de la punition obligatoire. D'où vient cette obsession punitive ? De notre héritage judéo-chrétien où toute faute appelle châtiment ? De nos fantasmes d'enfants terribles qui associent transgression et excitation ? Les behavioristes distinguent deux méthodes : punition ou renforcement positif. Imaginons une soumise qui reçoit caresses, privilèges et marques d'affection chaque fois qu'elle excelle. N'y a-t-il pas là un dressage plus subtil que le traditionnel "coup de cravache pour l'erreur" ? Deux écoles s'opposent. D'un côté, le dominant-gendarme, héritier des traditions punitives, qui éduque avec la menace de sanction possible. De l'autre, le dominant-jardinier, qui cultive la soumission comme une plante rare : par l'attention, la patience et la récompense. Le premier produit une soumission disciplinaire qui enlève la capacité de réflexion et donc offre une place plus large au lâcher-prise. Le second façonne une dévotion épanouie et créative. Et justement lui laisse une forme de pression personnelle et d'évolution anarchique. On veut une jolie orchidée qui trône dans le salon ou du lierre qui s'attache à nous ? Comme évoqué dans mon premier texte, la punition sévère peut modifier un comportement mais laisse l'esprit intact, voire hostile. L'automobiliste qui respecte les limitations après un PV ne respecte pas davantage l'autorité. Il la craint et nourrit de la rancune. Dans nos alcôves, une soumise "corrigée" brutalement peut obéir en surface tout en développant une résistance souterraine, voire inconsciente. Est-ce là l'objectif ? Une soumission par peur plutôt que par abandon ? Je pousse la réflexion un peu plus loin. Pour moi il y a un aspect sous-jacent : quand une soumise commet une faute intentionnelle, il y a un message à entendre. Souvent c'est le dominant qui fait mal son travail. La punition trop forte, trop systématique est de toute évidence une erreur et surtout une preuve que le duo ne fonctionne pas. Je dirais même que c'est souvent le dominant qui ne gère pas bien la situation. On peut aspirer à ce que la dynamique BDSM prospère sans jamais recourir à la punition. Elles se fondent sur le respect mutuel, le consentement, le volontarisme et la complémentarité. La soumise sert par amour, non par peur. Le dominant guide par sagesse, non par intimidation. Ces relations, souvent plus durables que leurs cousines punitives, reposent sur un principe simple : pourquoi punir l'échec quand on peut célébrer la réussite ? La violence reste présente dans les pratiques sans qu'il y ait une connotation punitive. Le BDSM utilise tout autant le fouet que la carotte pour le plaisir. Et la carotte, on ne la mange pas... La vraie domination ne devrait-elle pas consister à rendre la soumission si délicieuse que l'idée même de désobéir ne vienne jamais à l'esprit ? À créer un cadre si stimulant que la soumise n'ait d'autre envie que de s'y épanouir ? Les racines de la punition Si l'on doit éradiquer la punition, il faut aussi le faire de manière volontaire et pour les bonnes raisons. Pas parce qu'on perd le combat de la domination. Le BDSM 2.0 s'est imposé et pas de la façon qu'on aurait imaginée. La multiplication des appellations des dominants est symptomatique. Avant il y avait le SM, un maître et une soumise. Point. Maintenant il y a le BDSM, des soft dom, des pleasure dom, daddy, primaux, etc... Et au lieu d'expliquer ce qui nous définit, cela ne fait que morceler. Et de plus, il faut faire état de son CD, Curriculum Domini, pour prouver sa crédibilité. Le dominant doit justifier de ses capacités et la surenchère n'est pas loin. La punition considérée comme archaïque peut se retrouver à sa portion congrue et reléguée à quelques dominants qui vont se définir comme punisseurs et ils vont mourir seuls dans leur cave. Non pas parce que nous aurons décidé d'être modernes, en avance et que nous aurons décidé dans notre intellect que c'est la bonne façon d'évoluer, mais parce qu'on perd le combat contre le wokisme grignotant, le morcellement par l'égotisme et l'individualisation du BDSM. Alors ça y est, le dominant n'est plus qu'un acteur de la scène comme un autre ? Il ne doit pas faire peur, ni impressionner ? Il n'est plus qu'un pourvoyeur de service ? Cette petite phrase presque ridicule "je suis dur, mais juste" devient "je suis juste"... Mais n'est-ce pas un peu trop juste ? En supprimant la punition, arme ultime, est-ce qu'on n’égratigne pas un peu le charisme et de force à l'image du dominant ? ### Dobby or not Dobby Il y a cependant de vrais arguments scientifiques qui prônent pour la légitimité de la punition. Pour résumer : certaines personnes ont recours à l'auto-punition pour combler leur culpabilité. La recherche scientifique a démontré que certaines personnalités trouvent leur équilibre dans la dialectique faute/châtiment. L'équipe de Nelissen et Zeelenberg a formalisé ce qu'ils nomment "l'Effet Dobby" : lorsque les opportunités de compensation directe sont absentes, la culpabilité évoque spontanément des comportements d'auto-punition, manifestés par le déni de plaisirs ou l'imposition de pénalités personnelles. Cette découverte fait écho aux travaux de Carveth sur le "besoin inconscient de punition" comme mécanisme d'évitement du sentiment de culpabilité, où les individus cherchent activement à se punir pour soulager leur tension psychique. Des mécanismes déjà conceptualisés par Freud sous le terme de masochisme moral. Faisant partie moi-même de cette espèce des masochistes sociaux qui aiment ne pas faire signer de devis aux clients à la moralité variable et qui vont tenter de ne pas payer en définitive. Eh bien, il faut effectivement se faire violence pour arrêter cette mauvaise attitude. En être conscient n'est pas suffisant et peut prolonger une mauvaise habitude. Ainsi la leçon de quelqu'un de l'extérieur qui nous fait du mal en réponse à notre bonne volonté n'est pas suffisante. Mais si quelqu'un en qui on a confiance vient me taper la tête en me disant "t'arrêtes tes bêtises", là oui, je vais changer d'attitude parce que je sais que c'est pour mon bien. La recherche inconsciente de déplaisir motivée par des sentiments de culpabilité c'est quand la souffrance elle-même devient l'objectif. Les neurosciences éclairent ces phénomènes en révélant l'intrication des systèmes de douleur et de plaisir. Vera Békés, psychologue clinicienne et chercheuse, avec ses collaborateurs ont identifié six sous-types de masochisme psychologique, dont le type "Plaisir Sexuel vs. Sentiment de Culpabilité" qui témoigne d'une origine traumatique spécifique. Ces recherches convergent pour démontrer que l'auto-punition induite par la culpabilité constitue un signal social de remords aux fonctions adaptatives documentées, validant l'existence de ces âmes qui ne trouvent leur apaisement que dans l'expiation volontaire. Oh je vous entends : vous pensez de suite à une pathologie qu'il conviendrait de guérir et que, donc, par définition, infliger des punitions ne ferait que faire perdurer la mauvaise habitude. Tout d'abord tout le monde n'a pas une capacité de résilience et la relation D/s peut être aussi une forme symbiotique pour se sentir mieux à deux plutôt que seul. Ensuite, selon Vera Békés, les profils masochistes moraux ne sont pas automatiquement pathologiques. Elle distingue des formes adaptatives (comme le sous-type "Overall Gratification Inhibition" qu'elle qualifie de plus "sain") des formes pathologiques (comme le "Global Conflict" associé aux troubles de personnalité). Pour elle : le masochisme peut être un mécanisme de régulation émotionnelle normal pour "éviter la souffrance incontrôlable en entreprenant volontairement d'autres souffrances plus contrôlables". En résumé : certains besoins de punition relèvent de stratégies d'adaptation saines, d'autres signalent une pathologie. Békés nuance la vision freudienne en reconnaissant que ce n'est pas systématiquement un symptôme à traiter. Pour être concret, certaines personnes peuvent être soulagées par une forme de masochisme et/ou de punition pour éviter des moments d’angoisse qui poussent à la scarification. Mais les souffrances peuvent aussi mentales et même inconscientes. On peut estimer que dans une dynamique de relation D/s, le dominant soit celui qui prenne la responsabilité d'infliger la punition afin de soulager sa soumise et éventuellement la faire sortir de punitions auto-infligées. Devenir un maître qui punit potentiellement enlève ainsi une grosse part d'anxiété à la soumise. Et enfin, je me pose la question sur la naturalité philosophique de la punition. La Nature, voire la vie sauvage, est de nature punitive. Le feu brûle. Approchez votre main et la sanction est immédiate : vous n'y reviendrez pas. Essayez de piquer un nonos à un tigre, il y a peu de chance d'en réchapper. On l'oublie mais l'humain essaie de dépasser les règles certes mais il sait aussi qu'il y a des incontournables : on ne vole pas sans parachute ou wingsuit. Une seule erreur et on s'écrase au sol. La Vie suit un ensemble de règles qui peuvent nous sanctionner à chaque instant. Georges Bataille dans son Roman l’Erotisme a dit "L'homme se nie lui-même, il s'éduque, il refuse de donner à la satisfaction de ses besoins animaux ce cours libre, auquel l'animal n'apportait pas de réserve". En substance, il y a une différence entre le primal et l'humain. On aime à dire qu'on pervertit notre côté sauvage et primaire pour jouir sans objectif de reproduction. Mais peut-on dire que c'est légèrement plus compliqué que cela ? Que l'Homme est vraiment différent du reste du monde animal. Il a quand même gardé et sophistiqué la punition comme outil d'organisation et de coercition. La question reste posée : les pratiquants BDSM conscients et expérimentés pourraient-ils se passer de la punition ? Faut-il suivre un ordre naturel et se réapproprier un système pour notre convenance, ou au contraire, abandonner une habitude primitive, un système qui nous oppresse au quotidien ? Montrer une autre voie de développement personnel certes avec des pratiques extrêmes mais dans un but bienveillant sans coercition ? Peut-être que l'avenir du BDSM réside dans la synthèse : garder la punition pour celles et ceux qui en ont véritablement besoin, tout en développant des modèles alternatifs basés sur le renforcement positif, la créativité relationnelle et l'épanouissement mutuel. Car après tout, si le but est de créer des soumises épanouies et des dominants accomplis, peu importe le chemin emprunté pourvu qu'il mène au bonheur partagé. Personnellement je vais continuer à faire le grand écart. J'ai du mal à m'imaginer sans la possibilité de punition BDSM car elle représente un symbole pour moi : un outil d'oppression que je transforme en outil sincère d'épanouissement. À l'instar du fouet, toujours utilisé comme instrument punitif officiel dans certains pays, nous l'utilisons pour offrir des sensations et des émotions extrêmes au résultat positif. On peut donc garder la punition en l'adaptant à notre manière en conscience. Je n'écarte pas le côté thérapeutique que peut revêtir la punition pour certaines personnes. La punition révèle aussi une notion de pouvoir. Pas nécessairement une force brutale qui écrase, mais une technique à la force variable qui transforme. Nous ne sommes plus dans l'univers de La Boétie et de sa "servitude volontaire", mais dans celui d'une liberté assumée qui passe paradoxalement par l'acceptation ponctuelle de contraintes choisies. La soumise qui accepte le concept de punition n'abdique pas sa liberté : elle l'exerce de la manière la plus radicale qui soit. Une soumise viendrait-elle encore plus vers un dominant qui affirmerait qu'il ne pratique pas la punition ? Ou serait-ce le contraire ? Une soumise a-t-elle besoin de sentir la force et la puissance ? Le côté inconscient doit être respecté et quelquefois on s'approche du feu pour ressentir la chaleur mais aussi se brûler légèrement pour se rappeler du chemin qu'il faut continuer de suivre. C'est souvent dans l'extrême contrainte que naît la plus pure des libertés. Non pas malgré la punition, mais grâce à elle, transformée et sublimée par l'amour et le consentement mutuel. Alors, pour vous, punition ou pas punition ? Ethan Référence Nelissen, R. M. A., & Zeelenberg, M. (2009). When Guilt Evokes Self-Punishment: Evidence for the Existence of a Dobby Effect. Journal of Experimental Social Psychology, 45(6), 1385-1388. Carveth, D. L. (2001). The Unconscious Need for Punishment: Expression or evasion of the sense of guilt? Psychoanalytic Studies, 3(1), 9-21. Békés, V., Perry, J. C., & Robertson, B. M. (2016). Psychological masochism: A systematic review of the literature on conflicts, defenses, and motives. Psychotherapy Research, 28(3), 470-483.
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Ethan, adepte du BDSM, dominant, explorant une philosophie humaniste au travers d'une pratique socialement en marge. Archives
Juin 2025
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